« Il était une fois un jeune et beau Prince qui vivait dans un magnifique château où il donnait des fêtes somptueuses. Mais, trop dorloté par des domestiques prêts à satisfaire ses moindres caprices, celui-ci était devenu insolent et égocentrique. » La suite, vous la connaissez déjà : le prince, son château et ses occupants furent maudits par une enchanteresse, la malédiction ne pouvant être levée qu’une fois que le prince aura réussi à aimer, et surtout à se faire aimer en retour. Ainsi, après Alice au Pays des Merveilles, Maléfique, Cendrillon, et le Livre de la Jungle, La Belle & la Bête est le dernier grand-classique Disney à bénéficier d’un remake en « live-action ». Mais que vaut ce n-ième remake de Disney par Disney, qui sortira le 22 mars 2017 ? On vous donne son avis sur cette nouvelle adaptation de l’Histoire Éternelle préférée de la Génération Y.
L’histoire de La Belle & la Bête remonte au XVIIIème siècle. Il s’agit d’un conte moral français permettant d’expliquer aux enfants que la véritable beauté n’est pas physique, mais vient du cœur et de la vertu. La première version est écrite par Gabrielle-Suzanne de Villeneuve, dans son recueil La Jeune Américaine et les Contes Marins. Mais ce n’est que quelques années plus tard, que le récit connaît un véritable succès, avec la seconde version écrite par Jeanne-Marie Leprince de Beaumont, dans son livre Le Magasin des Enfants. Dès lors, c’est cette version qui servira de référence, notamment pour les multiples adaptations de l’œuvre qui s’ensuivirent, dont les inoubliables versions cinématographiques de Jean Cocteau en 1946, ou plus récemment de Christophe Gans en 2014. Mais c’est bien évidemment la version animée de Walt Disney, qui retiendra ici notre attention.
La Belle & la Bête version 2017 est donc à la fois un remake en « live action » du Grand Classique Disney de 1991 écrit par Linda Woolverton (Le Roi Lion, Mulan, Maléfique), et de la comédie musicale de Broadway elle-même adaptée du dessin animé Disney, mais également une nouvelle adaptation de l’œuvre de Jeanne-Marie Leprince de Beaumont (le film reprenant certains éléments du récit original laissés de côté par le film d’animation).
Pour arriver à concilier ces trois versions du récit, tout en nous offrant une ultime version de cette célèbre histoire d’amour, les studios Disney ont fait appel à Stephen Chbosky (auteur du roman Le Monde de Charlie et réalisateur de son adaptation cinématographique) et Evan Spiliotopoulos (scénariste de nombreux films d’animation DisneyToon Studios, dont Le Livre de la Jungle 2, Le Roi Lion 3, Tarzan 2, Cendrillon 3, la Petite Sirène 3) pour l’écriture du scénario.
L’histoire et les personnages tant aimés du grand classique de l’animation Disney, La Belle & La Bête, prennent désormais vie comme jamais à travers cette époustouflante adaptation en « live action » d’un des plus beaux récits jamais contés. La Belle & La Bête relate l’incroyable destinée de Belle, une jeune fille aussi brillante qu’indépendante, retenue prisonnière dans un château par une Bête hideuse. Bravant sa peur, elle se lie d’amitié avec les domestiques transformés en objets enchantés suite à un sortilège, et découvre peu à peu qu’au-delà de l’apparence physique de la Bête se cache un véritable Prince au cœur pur…
Si ce remake en « live-action » nous permet de retrouver toute la panoplie de personnages déjà découverts dans le grand classique d’animation, leurs traits de caractère ont quelque peu été approfondis.
Ainsi, la Belle, interprétée par Emma Watson (la saga Harry Potter, Le Monde de Charlie, Noé) est plus rebelle et espiègle que le personnage d’origine. Elle n’en reste pas moins la Belle passionnée de littérature, érudite, et prête à tout pour venir en aide à son père que nous connaissions. Mais ce nouveau trait de personnalité introduit par le film, rend finalement le personnage moins lisse et plus froid vis-à-vis des habitants de Villeneuve, donnant en somme un côté plus réel à la personnalité de Belle.
Au côté de Belle, nous retrouvons son père Maurice, joué par Kevin Kline (Un Poisson Nommé Wanda, Le Bossu de Notre-Dame, La Conspiration). Tout comme sa fille, le personnage de Maurice évolue quelque peu : fini l’inventeur loufoque, et place à l’artiste tourmenté, fabriquant de boîtes à musique. S’il conserve son côté tête en l’air, Maurice gagne en profondeur en passant du comique au tragique, notamment avec la révélation de son passé parisien avec la mère de Belle.
En effet, après avoir fui Paris avec sa fille, Maurice est allé se réfugier au plus profond de la campagne française, dans le village de Villeneuve. Nous y retrouvons de nombreux personnages aperçus dans le dessin animé, comme Monsieur D’Arque, le boulanger, les commères, les marchands, les paysans, les Triplettes… mais aussi des nouveaux, dont certains pourraient bien être liés à l’histoire de la Malédiction du Château, comme le maître d’école, les lavandières, Monsieur Jean l’Amnésique, Clotilde la Vieille Mégère, et les anciens soldats et amis de Gaston.
Car parmi ces villageois, nous retrouvons bien entendu Gaston, le principal antagoniste du film. Interprété par Luke Evans (les sagas Le Hobbit, et Fast and Furious), le passé du personnage est aussi plus fouillé que dans le dessin animé. Gaston n’est pas qu’un simple chasseur vaniteux, imbu de sa personne, et propriétaire de la Taverne du village de Villeneuve, il est aussi et surtout un ancien soldat de l’armée royale et héros de guerre, dont les horreurs des champs de batailles ont laissé quelques traces sur sa santé mentale, notamment une profonde paranoïa.
Qui dit Gaston, dit bien entendu son célèbre acolyte, LeFou, joué par Josh Gad (La Reine des Neiges, Pixels). Ami d’enfance de Gaston, LeFou de ce remake est le premier personnage ouvertement gay de l’univers Disney : il est très clairement amoureux de Gaston, et les situations cocasses et les quiproquos sur leur relation ne cessent de se multiplier tout au long du film. Bien qu’il conserve un aspect comique, le personnage est toutefois bien plus malin que sa version animée. LeFou est d’ailleurs majoritairement celui qui représente la conscience de Gaston lorsque celui-ci agit de façon irrationnelle, et finira d’ailleurs par se rendre compte que la véritable bête n’est pas celle qu’il croyait être.
Mais notre film s’appelant La Belle & la Bête, quittons le village de Villeneuve et ses habitants pour rejoindre les occupants du domaine maudit, à commencer par le maître des lieux, La Bête. Comme pour les autres personnages, La Bête retrouve globalement son caractère colérique qui la caractérise tant dans le Grand Classique Disney. Mais celui-ci est en plus accentué par un côté très hautain. Pour vous faire une image rapide du personnage, la Bête, c’est un peu Louis XIV qui aurait été ensorcelé. Il n’en reste pas moins attachant, plus particulièrement lorsque l’on découvre son passé, et son enfance difficile. C’est Dan Stevens (la série Downton Abbey) qui prête ses traits à la fois à la Bête, mais aussi au Prince.
Pour aider la Bête à briser la Malédiction de l’Enchanteresse, nous retrouvons notre trio de domestiques de choc, Lumière, Big Ben et Madame Samovar, toujours accompagnée de son fils Zip. Ces personnages évoluent finalement peu dans leur caractère par rapport à leur version animée. Ils sont même moins présents, afin d’occuper réellement les seconds rôles de l’intrigue. Les quatre personnages sont respectivement interprétés par Ewan McGregor (la saga Star Wars), Ian McKellen (la saga du Seigneur des Anneaux), Emma Thompson (Nanny McPhee), et Nathan Mack pour la première fois au cinéma.
À contrario Plumette, la compagne de Lumière, gagne en présence à l’écran au côté de son chandelier de mari. Il en est de même pour Madame de Garde-Robe, la célèbre cantatrice piégée par la Malédiction et transformée en armoire. Mais cette dernière se voit accompagnée elle aussi d’un conjoint, le Maestro Cadenza, nouveau personnage inspiré de Forte, le maître à musique de la Bête dans le second volet des aventures animées de La Belle & la Bête 2 : Le Noël Enchanté. Mais leur ressemblance s’arrête à leur fonction de musicien, puisque le Maestro Cadenza fait partie des « gentils ». Ces trois personnages sont joués respectivement par Gugu Mbatha-Raw (Jupiter : le Destin de l’Univers), Audra McDonald (le téléfilm Annie), et Stanley Tucci (la saga Hunger Games).
Enfin, dernier personnage, et non des moindres, l’Enchanteresse. Si elle n’était qu’évoquée dans le prologue du Grand Classique Disney, l’Enchanteresse est cette fois plus présente, et est même actrice de l’intrigue du film : une partie des événements arrive parce qu’elle l’a décidé, et elle va même jusqu’à sauver l’un des personnages-clés du film. Enfin, c’est de son fait que la Malédiction est levée, contrairement au dessin animé. C’est Hattie Morahan (Braquage à l’Anglaise) qui donne ici ses traits à cette femme mystérieuse et empreinte de justice sociale.
Derrière la caméra, nous retrouvons le réalisateur Bill Condon (Sister Sister, Dreamgirls, Twilight 4 et 5). La mise en scène est plutôt classique, et s’inspire très largement de celle du Grand Classique d’Animation, en y apportant toutefois une touche un peu plus sombre et adulte. Certains plans et séquences sont toutefois bien trouvés, notamment dans les numéros musicaux. Nous pourrons cependant regretter quelques transitions parfois trop abruptes entre les scènes ; ceci est particulièrement flagrant entre la fin de « C’est la Fête » et la scène qui suit.
Si La Belle & la Bête ne se fait pas remarquer par sa réalisation, il en est par contre tout autre en ce qui concerne son style. Le film assume pleinement la période dans laquelle son intrigue se déroule, à savoir le milieu du XVIIIème siècle en France, marqué par un style baroque, aussi bien dans les costumes des personnages que dans l’architecture des lieux, notamment le Château de la Bête… « Et si c’est pas baroque, c’est du toc » comme le dirait Big Ben. Cette exubérance du baroque est également retranscrite à travers le design des domestiques/objets. De façon générale, l’aspect visuel plus réaliste est l’un des grands points positifs de ce remake en « live-action ». Outre le côté sombre de la réalisation, c’est aussi par là que l’aspect plus adulte du film est retranscrit.
Comme nous l’évoquions plus haut, La Belle & la Bête est à la fois un remake du dessin animé de Disney et une nouvelle adaptation de l’œuvre originale. Outre l’intrigue générale et l’aspect musical que nous développerons ci-après, le côté remake en « live-action » passe essentiellement par la réutilisation des lieux et des personnages introduits dans le dessin animé, et plus particulièrement de leur style vestimentaire.
Mais le film va plus loin que le contenu initial de 1991, et notamment au niveau de son intrigue. Certaines incohérences temporelles sont gommées par cette réécriture du Grand Classique, lui apportant ainsi plus de cohérence. C’est notamment le cas de la météo très changeante (mais pourquoi passe-t-on de l’été à l’hiver en un claquement de doigt ?), ainsi que l’âge de la Bête (si cela fait des années qu’il a été maudit comme jeune prince, alors la Bête était-elle un enfant lorsqu’il a été transformé ?), ou bien encore le fait que les habitants du village ignore totalement l’existence du Château (alors qu’il est situé à quelques kilomètres du village !). Le film permet aussi d’approfondir les personnages, et de creuser notamment un peu plus le passé de Belle et de la Bête, expliquant ainsi plus facilement leur destin croisé.
Sur le côté adaptation, le film réutilise certains aspects du conte d’origine, laissés de côté par la version animée de 1991. C’est notamment le cas du « vol » d’une rose par Maurice dans le jardin de la Bête, qui lui vaudra son emprisonnement initial, tout comme dans le conte. Mais en cherchant plus, nous retrouvons également le conte dans les attitudes de Belle et de la Bête à la fin du film, avec, d’un côté, la promesse que fait cette dernière de revenir au Château après avoir aidé son père, et de l’autre, une Bête qui se laisse mourir d’amour après le départ de sa Belle, non pas parce qu’il sait que la fin du délai pour lever la Malédiction est proche, mais parce qu’on lui fait croire que Belle ne tiendra pas sa promesse, et ne reviendra pas. La réussite de cet habile mélange des différentes écritures de l’histoire est très certainement l’un des points forts de ce remake.
Mais le grand point fort de La Belle & la Bête est bien entendu sa musique. 26 ans après avoir écrit la partition du film d’animation, et 23 ans celle de la comédie musicale, Alan Menken (La Petite Sirène, La Belle & la Bête, Aladdin, Pocahontas, Le Bossu de Notre Dame, Hercule, Il Etait une Fois, Raiponce) récidive avec une partition reprenant très largement les morceaux qu’il avait déjà composés pour le cinéma et les planches, mais en les sublimant littéralement grâce à une réorchestration d’un niveau digne des plus grands films Hollywoodiens.
Et pour cette nouvelle adaptation, en plus des chansons originellement écrites avec Howard Ashman, Menken retrouve à l’écriture Tim Rice (Aladdin, les comédies musicales Le Roi Lion, Jesus Christ Superstar, Evita, La Belle & la Bête) pour cinq nouvelles chansons, dont trois remplacent des morceaux écrits pour la comédie musicale… que nous retrouvons toutefois dans le film, mais dans des versions orchestrales.
La Belle & la Bête est très certainement le remake d’un Grand Classique Disney en « live-action » le plus réussi à ce jour, après le Livre de la Jungle. Tout en respectant le matériel d’origine, le film sublime littéralement cette histoire pourtant maintes fois portée à l’écran. Il n’est ni un remake pur du dessin animé ou de la comédie musicale, ni une nouvelle adaptation du conte, il est tout cela à la fois, nous offrant ainsi une vision nouvelle sur cette œuvre majeure de la culture littéraire française à travers le monde. Pour découvrir ou redécouvrir vous aussi cette « Histoire Éternelle » sur grand écran, rendez-vous à partir du 22 mars 2017 dans vos cinémas.